Renouvellement de la période d’essai : que suppose l’acceptation claire et non équivoque du salarié ?
Le renouvellement de la période d’essai suppose l’accord exprès du salarié, traduisant une manifestation claire et non équivoque de volonté de sa part. Pour apprécier cette volonté claire et non équivoque, qui ne ressortirait pas de façon évidente de la lettre de renouvellement établie par l’employeur, les juges peuvent se fonder sur les échanges de courriels du salarié avec des entreprises recruteuses.
Acceptation claire et non équivoque du salarié pour renouveler sa période d’essai
La période d’essai peut être renouvelée une fois, à la double condition que cette possibilité soit prévue :
-par un accord de branche étendu, ou une convention collective étendue, applicable à l’entreprise, qui en fixe les conditions et les durées (c. trav. art. L. 1221-21) ;
-par la lettre d’engagement ou le contrat de travail (c. trav. art. L. 1221-23).
Le renouvellement de la période d’essai exige aussi l’accord exprès du salarié avant l’échéance de la période d’essai initiale (circ. DGT 2009-5 du 17 mars 2009 ; cass. soc. 11 mars 2009, n° 07-44090, BC V n° 77).
Cet accord exprès doit résulter d’une manifestation claire et non équivoque de volonté qui ne se déduit pas de la seule apposition d’une signature sur un document établi par l’employeur (cass. soc. 25 novembre 2009, n° 08-43008, BC V n° 265 ; cass. soc. 8 juillet 2015 n° 14-11762 D).
En revanche, la signature du salarié accompagnée de la mention manuscrite « lu et approuvé » sur la lettre de renouvellement permet de caractériser l’acceptation claire et non équivoque du salarié (cass. soc. 23 septembre 2014, n° 13-17140 D ; cass. soc. 21 janvier 2015, n° 13-23018 D).
Toutefois, à défaut d’une telle mention, d’autres éléments peuvent-ils caractériser cette volonté du salarié ?
C’est à cette question que répond la Cour de cassation.
Un salarié conteste avoir accepté le renouvellement de sa période d’essai
Dans cette affaire, une société a engagé un directeur des ressources humaines en CDI avec une période d’essai de 3 mois renouvelable, le 18 juillet 2016.
Le 28 septembre 2016, l’employeur a soumis au salarié une lettre de renouvellement de sa période d’essai, qu’il avait signé, sans autre mention.
Le 1er décembre 2016, la société a rompu la période d’essai.
Le salarié a saisi la justice estimant ne pas avoir accepté de façon claire et non équivoque le renouvellement de sa période d’essai, entraînant ainsi la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La cour d’appel, puis la Cour de cassation, ont rejeté sa demande.
L’accord du salarié peut être caractérisé par des courriels échangés avec des tiers
La cour d’appel a considéré que la période d’essai avait été valablement renouvelée car :
-bien que le salarié ait seulement apposé sa signature sur la lettre de renouvellement établie par la société, sans y porter d’autre mention,
-il ressortait des courriels échangés avec des recruteurs et d’une attestation de l’un d’eux que le salarié avait manifesté sa volonté de manière claire et non équivoque d’accepter le renouvellement de sa période d’essai.
Dans ces courriels, le salarié indiquait aux recruteurs que sa période d’essai avait été prolongée et qu’il était en recherche d’emploi.
La Cour de cassation confirme cette décision.
Il en ressort ainsi que, lorsqu’un employeur fait signer une lettre de renouvellement de la période d’essai au salarié, sans autre mention univoque (telle que « lu et approuvé »), d’autres éléments peuvent permettre de caractériser l’acceptation claire et non équivoque du salarié à ce renouvellement.
Néanmoins, en cas de litige, encore faut-il disposer de tels éléments. Pour se prémunir d’une éventuelle contestation du salarié, il est donc préférable de bien cadrer le renouvellement de la période d’essai, en s’assurant que le salarié signe la lettre de renouvellement et y ajoute la mention manuscrite « lu et approuvé ».
Cass. soc. 25 janvier 2023, n° 21-13699 D