Changer la forme juridique de sa société dans un but fiscal !
Un abus de droit ?
Qu’est-ce que c’est ? L’abus de droit consiste, soit à utiliser des actes fictifs, soit à rechercher le bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs. L’administration dispose de la possibilité d’écarter tous les actes constitutifs d’un abus de droit qui n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales.
Sévèrement sanctionné ! L’abus de droit est sanctionné par l’application de l’intérêt de retard et d’une majoration égale à 40 % voire 80 % des droits mis à la charge du contribuable.
En pratique…
L’abus de droit par simulation. Il peut résulter d’un acte fictif (par exemple, la location fictive d’un immeuble visant à déduire des dépenses de travaux, le bailleur se réservant en réalité la jouissance personnelle de cet immeuble) ou d’un acte déguisé (par exemple, une donation déguisée en vente afin d’éluder une partie des droits de mutation).
L’abus de droit par fraude à la loi. La fraude à la loi en matière fiscale est caractérisée lorsqu’une opération présente un but exclusivement fiscal et qu’elle se traduit par l’obtention d’un avantage fiscal par une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs. C’est le cas, par exemple, du recours à un montage juridique et économique artificiel. La recherche d’un but exclusivement fiscal consistant à éluder ou atténuer les charges fiscales peut notamment prendre la forme d’une réduction d’une dette d’impôt ou de la perception indue d’un crédit d’impôt ou encore de l’augmentation abusive d’une situation déficitaire.
Mais il n’y a pas abus de droit si… Dans certains cas, les contribuables ont la possibilité de choisir entre plusieurs solutions pour réaliser une opération déterminée. Le fait qu’ils optent pour la solution la plus avantageuse au plan fiscal ne permet pas de conclure à l’abus de droit s’il apparaît que les actes juridiques sur lesquels repose cette solution sont conformes à la réalité. De même, ne sont pas constitutifs d’un abus de droit les actes juridiques dont les conséquences ont été mal appréciées par le contribuable ou ceux dont la nature ou le caractère n’est pas contesté, mais qui, selon l’administration, aboutissent à des conséquences anormales dans la mesure où l’une des parties consent à l’autre un avantage injustifié.
Un changement de forme de société ?
Un cas jugé… L’administration considérait que, dans un groupe de sociétés, le changement de forme sociale de SA en SNC d’une filiale avait permis d’éviter l’imposition à l’IS de la quote-part des bénéfices transférés à la société mère et imputés par cette dernière sur la totalité de ses déficits reportables.
… en faveur du contribuable ! Le Conseil d’État a donné tort à l’administration, jugeant, d’une part, que la SNC n’a pas recherché le bénéfice d’une application fiscale littérale (CGI art. 8) à l’encontre des objectifs poursuivis par ses auteurs : l’usage des SNC n’est pas interdit aux personnes morales. D’autre part, la SNC a poursuivi son activité économique après la modification de sa forme sociale jusqu’à son apport à une autre société détenue par la société mère et a conservé sa forme sociale après cet apport. Ce qui excluait un montage totalement artificiel et exclusivement fiscal. Pour ces deux motifs, l’abus de droit n’était pas établi par l’administration (CE 15.02.2016 n° 374071) .